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Les médicaments biologiques
Les dispositifs incitant la prescription des médicaments biosimilaires

Incitation à la prescription hospitalière de médicaments biologiques similaires délivrés en ville

Une instruction de la DSS du 19 février 2018  a mis en place un dispositif incitatif permettant de valoriser les efforts des établissements de santé qui augmentent le taux de recours à certains médicaments biosimilaires, dans le cadre des PHEV. Jusqu'à maintenant, cette catégorie de médicaments biosimilaires ne bénéficiait pas de mesures d'accompagnement suffisamment développées.

Ce dispositif s'applique à tous les établissements ayant signé un CAQES. Les ARS, en lien avec les OMEDITs et les organismes d'Assurance Maladie, sont chargées d'assurer la promotion de ce dispositif.

Une rémunération complémentaire est versée aux établissements de santé. Cette « nouvelle modalité de financement permettant de promouvoir la qualité et l'efficience des prescriptions. »

Deux groupes de médicaments ont d'abord été retenus :
  • le groupe étanercept ;
  • le groupe insuline glargine.
L'arrêté du 29 mai 2019 relatif à l'efficience et la pertinence de la prescription hospitalière de médicaments biologiques similaires délivrés en ville : indique que le groupe adalimumab est également conserné. 

Pour chacun de ces groupes, l'indicateur mesure l'efficience de la prescription hospitalière de médicaments biologiques similaires délivrés en ville.

C'est l'ensemble du parcours patient, y compris les prescriptions effectuées en ville à la suite d'une prescription hospitalière, qui va être pris en compte pour l'intéressement, ceci afin d'inciter les établissements de santé à dialoguer de manière renforcée avec les autres professionnels de santé qui interviennent dans la prise en charge du patient.

L'arrêté du 19 avril 2021 relatif à l'efficience et la pertinence de la prescription hospitalière de médicaments biologiques délivrés en ville, décrit ce dispositif pour l'année 2020 : 
"Pour chacun des trois indicateurs mentionnés à l'article 1er du présent arrêté, la dotation versée à l'établissement de santé dépend, pour chaque classe considérée, du taux de recours réalisé aux médicaments biologiques efficients et du volume de prescription de l'établissement. Pour chaque classe de médicaments et pour chaque établissement, le calcul de la dotation à verser à l'établissement au titre de l'année 2020, s'effectue selon la formule suivante : V2020 × R × t2020
  • "V2020" représente le volume de prescription de l'établissement pour l'année 2020. Pour chaque établissement et pour chaque classe de médicaments, ce volume de prescription correspond au nombre de boîtes, le cas échéant ajusté afin de tenir compte de différences de posologie, ou de dosage, délivrées en ville pour les patients rattachés à cet établissement. Il inclut les boîtes de médicaments biologiques du groupe « efficient » et les boîtes de médicaments biologiques « de référence » au sens de l'article 2 du présent arrêté. Pour les classes de médicaments retenues dans le cadre du présent arrêté, les pondérations en annexe au présent arrêté sont appliquées ;
  • "R" est la rémunération marginale correspondant à 20 % de l'écart de prix existant entre un médicament biologique « efficient » et son médicament biologique de référence, pour la part de ce prix prise en charge par l'assurance maladie obligatoire ;
  • "t2020" est le taux de recours réalisé pour l'année 2020 aux médicaments biologiques efficients.
La valeur R retenue au titre de l'année 2020 est fixée comme suit :
  • 29,79 € pour le groupe étanercept ;
  • 1,15 € pour le groupe insuline glargine ;
  • 31,03 € pour le groupe adalimumab.
L'intéressement prévu par l'article 57 de la LFSS pour 2018 ne peut pas être calculé sur la base d'indicateurs relatifs au taux de prescription des médicaments biologiques efficients mentionnés à l'article 2 du présent arrêté.
Le versement de la dotation, à chaque établissement, est subordonné au respect des conditions de prescription et de prise en charge des produits concernés.
Le versement de la dotation financière de l'assurance maladie est effectué par l'Agence Régionale de Santé dont dépend l'établissement avant le 1er juin 2021, sous la forme de crédits d'aide à la contractualisation."

Expérimentation dans le cadre de l'article 51 de la LFSS

Dans le même temps, et pour aller plus loin, une intéressement renforcée est expérimentée.  

Ce dispositif incitatif rentre dans le cadre de l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 qui introduit « un dispositif permettant d'expérimenter de nouvelles organisations en santé reposant sur des modes de financement inédits », « dès lors que ces nouvelles organisations contribuent à améliorer le parcours des patients, l'efficience du système de santé, l'accès aux soins ou encore la pertinence de la prescription des produits de santé. »

De nouvelles approches peuvent véritablement être testées, en effet ce dispositif permet de déroger à de nombreuses règles de financement de droit commun, en ville, en établissement hospitalier (où la tarification à l'activité, la T2A, est actuellement en vigueur, associée à d'autres modes de financement) ou en établissement médico-social.
Les grandes orientations de ce dispositif sont définies par le conseil stratégique de l'innovation en santé (CSIS), qui va suivre les expérimentations, et se prononcer sur l'opportunité de les généraliser.

Ce sont les ARS qui ont pour mission de mettre en œuvre ce dispositif de l'article 51.

L'objectif de ce projet est de tester l'intérêt d'un dispositif prévoyant spécifiquement l'incitation des services hospitaliers prescripteurs, plutôt que l'incitation de l'établissement de santé dans son ensemble. L'intéressement est ici de 30 % de l'écart de prix entre le médicament biosimilaire et son médicament de référence.

À travers cette incitation spécifique, il est espéré un développement de l'utilisation des médicaments biosimilaires.

L'objectif principal de cette expérimentation est d'obtenir une augmentation plus rapide d'au moins 15 points du taux de prescription des médicaments biosimilaires dans les établissements participant à l'expérimentation, par rapport à des établissements comparables n'y participant pas.

Sur près de 80 dossiers de candidatures reçus, 45 (23 pour l'insuline glargine, 40 pour l'étanercept) ont été retenus pour participer à cette expérimentation (des CHU, des CH et des établissements privés).

L'expérimentation a été lancée en octobre 2018 et se termine le 1er avril 2022.

Le Journal officiel du 9 octobre 2018 a publié la liste des 45 établissements participants, dont 23 pour l'insuline glargine (8 CHU ou CHR, 11 CH et 4 établissements de santé privés d'intérêt collectif -Espic) et 40 pour l'étanercept.

Résultats en septembre 2021 (données Open PHMEV rassemblées par APMnews)

S'agissant de l'insuline glargine, le taux de prescription de biosimilaires en 2020 était supérieur à 40% pour plus des trois quarts des établissements de santé participant à l'expérimentation, alors qu'il était supérieur à 20% chez seulement 13% des expérimentateurs en 2017.

Ce taux a plus que doublé dans tous les hôpitaux participant à l'expérimentation sur la période 2017-2020.

Sur l'ensemble des établissements français disposant d'une activité MCO, le nombre moyen de boîtes délivrées a baissé plus fortement (-8,3% à 1.005 boîtes) mais les montants remboursés ont diminué dans les mêmes proportions (-23% à 39.529 euros).

Le médicament de référence Lantus* représentait encore 38,6% des boîtes prescrites en 2020 contre 74% en 2017, avec chaque année depuis 2016 une progression de la part du biosimilaire Abasaglar* (33,4% des boîtesen 2020), et dans une moindre mesure de Toujeo* (28%).
En montant remboursé, Lantus* représente 42,8% de la valeur en 2020 contre 68% en 2018 au début de l'expérimentation article 51, tandis qu'Abasaglar* est passé de 11,5% à 31,4% du total, et Toujeo* de 20,4% à 25,9%.

Concernant l'anti-TNF étanercept, les taux de biosimilaires prescrits ont explosé dans tous les hôpitaux expérimentateurs depuis entre 2017 et 2020.
En 2017, ce taux était nul dans près de la moitié (46%) des 40 établissements participants et seuls 18% des hôpitaux prescrivaient plus de 10% de biosimilaires. Trois ans plus tard, et après deux années d'expérimentation article 51, ce taux dépasse 40% dans plus des trois quarts des établissements (79%).

Dans les hôpitaux où les biosimilaires étaient déjà prescrits en 2017, mais dans des proportions comprises entre 5% et 20%, les taux ont grimpé jusqu'à environ 70% pour certains CHU. Les établissements qui ne prescrivaient aucun biosimilaire ont aussi vu leur taux de substitution bondir, jusqu'à 100% pour le CH de Montauban, et à plus de 70% pour le CH d'Angoulême.

Comme avec l'insuline glargine, les établissements qui prescrivent le moins d'anti-TNF apparaissent comme ayant un taux de prescription de biosimilaires le plus élevé.

Dans les hôpitaux expérimentateurs, le nombre moyen de boîtes d'anti-TNF prescrites a augmenté de 20% depuis 2017, pour s'établir à 7.712 en 2020, et le montant moyen remboursé a diminué de 7%, à 4.623.597 euros. La tendance est similaire dans l'ensemble des établissements MCO français, avec un nombre moyen de boîtes qui a progressé de 19,6% à 1.781, et un montant moyen remboursé s'établissant à 1.081.143 euros en 2020 (-7,5%).

Toutefois, la part de l'étanercept sur le marché des anti-TNF est en recul depuis 2014, passant de 28,4% à 22% en 2020 en nombre de boîtes, notamment face à la concurrence de l'adalimumab dont le référent est Humira (AbbVie) et avec quatre biosimilaires inscrits au remboursement entre octobre et décembre 2018 en France: Amgevita* (Amgen), Imraldi* (Biogen), Hyrimoz* (Sandoz, groupe Novartis) et Hulio* (Mylan, groupe Viatris). La part de l'adalimumab en volume est passée de 55,1% à 60,2%. 

Si l'on considère l'ensemble de la période 2017-2020, la prescription d'adalimumab a progressé de 75% en volume dans les hôpitaux concernés par l'expérimentation article 51, et de 11% en valeur, alors que celle de l'étanercept a respectivement baissé de 5,3% et 38,9%.

L'inclusion de l'adalimumab dans l'expérimentation début 2019 a également eu un impact sur la substitution biosimilaire. En 2019, 85% des hôpitaux concernés avaient un taux de prescription de biosimilaires inférieur à 25%, alors qu'ils n'étaient plus qu'un petit tiers (31%) en 2020.


Un projet de dispositif d'intéressement en ville

Début juillet 2019, l'Assurance Maladie a rendu ses propositions sur l'évolution des charges et produits pour l'année 2020

En plus du dispositif d'intéressement des établissements prescrivant des biosimilaires délivrés en ville et de l'expérimentation « article 51 », on retrouve la mise en place d'un dispositif d'intéressement en ville incitant à la prescription des biosimilaires. Un médecin libéral qui changerait ses pratiques serait ainsi récompensé à hauteur de 30 % des économies réalisées.

Il est envisagé d'inclure 3 médicaments :
  • l'étanercept : seuls les rhumatologues seraient concernés, pour un gain net de 14,8 millions d'euros ;
  • l'adalimumab : les gastro-entérologues et les rhumatologues seraient concernés, pour un gain net de 32,5 millions d'euros ;
  • la follitropine alfa : les gynécologues obstétriciens et médicaux seraient concernés, pour un gain net de 1,6 millions d'euros.
La mise en place de ce dispositif d'intéressement permettrait donc de réaliser 48 millions d'euros d'économies.

Il est à noter que, le 24 juillet 2019, l'ANSM a modifié les conditions de prescription et de délivrance de certaines biothérapies, notamment les spécialités composées d'adalimumab et d'étanercept : https://ansm.sante.fr/actualites/modification-des-conditions-de-prescription-et-delivrance-de-certaines-biotherapies-utilisees-dans-le-traitement-de-maladies-inflammatoires-chroniques-en-rhumatologie-gastroenterologie-dermatologie-ophtalmologie  : si « l'initiation d'un traitement par ces spécialités demeure réservée à un médecin hospitalier spécialiste de la pathologie concernée, il n'apparaît plus nécessaire que le traitement soit réévalué au moins annuellement en milieu hospitalier par ce même spécialiste. » Les renouvellements peuvent donc désormais être prescrits par un spécialiste en ville.
Ce changement permettra au dispositif d'intéressement en ville d'être pleinement opérationnel, pour l'étanercept et l'adalimumab.
Simplification de l'évaluation des biosimilaires
Le 3 août 2019 est paru un décret modifiant la procédure d'évaluation de certains médicaments par la commission de transparence de la HAS. Désormais, « les médicaments biosimilaires [...] sont considérés comme remplissant la même condition de service médical rendu » que la spécialité biologique de référence. En conséquence, l'avis de la commission de transparence n'est pas requis concernant leur inscription sur la liste des médicaments remboursables, à condition que le biomédicament de référence soit déjà remboursé. Ces dispositions existaient déjà pour les génériques. Elles ont pour but d'accélérer les délais de prise en charge des biosimilaires, et donc leur disponibilité.

A l'inverse, le décret introduit l'automaticité du déremboursement d'un biosimilaire lorsqu'il s'applique au médicament de référence.